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Jean-Louis Aubert / Refuge

À l’été 2018, Jean-Louis Aubert ouvre ses cartons. Le chanteur vient de passer deux ans sur les routes avec les Insus et s’apprête à repartir en tournée, cette fois-ci en solo avec le spectacle hologrammique Olo. Parmi la cinquantaine de chansons qui se sont accumulées au fil des saisons, l’une attire son regard : Ne m’enferme pas. « Je me souviens encore quand je l’ai présentée à mes copains Richard et Jean-Marc. C’était, gare Saint-Lazare, bien avant les débuts de Téléphone », se remémore l’ancien leader du plus grand groupe de rock français (1976-1986)

Richard, c’était le batteur Richard Kolinka. Et Jean-Marc, un décorateur de cinéma, disparu depuis, celui qui lui avait montré ses premiers accords de guitare. Grâce à ces accords, Jean-Louis Aubert a pu composer quelques-uns des classques de la chanson française, de Ça s’est vraiment toi (1982) à Un Autre Monde (1984) ; de Juste une illusion (1986), pour sa première sortie en solo, au manifeste écolo Locataire sur l’album Bleu Blanc Vert (1989). Dans cette liste incomplète, on ne saurait omettre la tristement prémonitoire Bombe humaine (1982), si durement présente à nouveau après les attentats du Bataclan, en novembre 2015.

Que contient de si précieux Ne m’enferme pas, outre ses accords de guitare à la fraîcheur dylanienne ? « Parfois je me sens si loin d’où je viens / Qui je suis vraiment / C’est difficile à dire, tu sais ce que je peux sentir / Je cherche, je veux trouver quelqu’un que je connais / Et qui frappe en dedans, qui me dit : “Jean-Louis !” » Aujourd’hui qu’elle ouvre son neuvième album studio, le baptisé Refuge, son auteur s’en explique : « À travers cette chanson, je m’adresse à cet ancêtre qui gît au fond de moi, cet enfant qui m’a amené sur cette route et que depuis je ne cesse de remercier. Il paraît que les cerveaux des enfants sont marqués avant leur conception jusqu’à leurs 2 ans. Nous sommes très sollicités de l’extérieur alors qu’il nous faut rééquilibrer à l’intérieur pour lutter contre nos peurs.»

À partir de cette chanson, l’auteur a déroulé la pelote et, rapidement, vingt-deux titres se sont retrouvés gravés avec l’idée d’un « album sur la ligne de vie, qui parle de choses intérieures nous aidant à vivre ensemble. » Près de dix ans après l’album Roc Éclair et ses 400 000 exemplaires écoulés (2010) et cinq ans après Les Parages du vide (2014) sur des poèmes de Michel Houellebecq, Jean-Louis Aubert est retourné en studio dès que sa tournée — deux parties, Prémices à l’automne 2018 et Prémixces au printemps-été 2019 — le lui permettait. Au studio de La Frette, où il succédait à la chanteuse britannique Marianne Faithfull et au combo rock de Sheffield The Artic Monkeys, le musicien a couché toutes les parties de son double album : piano, basse, guitares, batterie, à l’exception des cordes et des cuivres. «Mes influences musicales n’ont pas changé. Même si je suis moins friand de l’ambiance groupe de rock, “trois, quatre”, en studio, j’écoute toujours autant les Stones, les Beatles, Led Zeppelin, Neil Young que du reggae. Ce qui a changé, c’est la manière d’aborder la musique. Devant le piano, je me sens comme un gamin prêt à se démettre l’épaule quand il le découvre. Je me retrouve dans la définition nietzschéenne selon laquelle la maturité d’un homme vient de sa capacité à faire les choses aussi sérieusement qu’un enfant qui joue. J’aime cette innocence, même si je ne me sens plus aussi naïf.»

Ce qui prévaut, c’est la mélodie, ces harmonies sur lesquelles le chant vient se poser, qu’elles se déclinent sous forme de ballades poignantes (Aussi loin, Sculpteur de vent, Demain ou bien encore L’Ange et la Grande d’après la correspondance du couple iconique de la réconciliation franco-allemande Marlène Dietrich et Jean Gabin) ou bien de groove (Du Bonheur), de rock bien binaire (Tu vas l’aimer) de standard immédiat (Bien sûr).

La musique, c’est qui fait le succès d’une chanson mais ce sont les paroles qui l’inscrivent dans le temps. « Notre métier, rappelait Jacques Higelin, consiste à être des guetteurs. Nous devons voir avant les autres. »

Dans Roc Éclair, Jean-Louis Aubert rendait hommage à son père qui avait assisté, effaré, à la montée du nazisme en Europe et avait trouvé refuge dans la musique, la poésie et la philosophie, durant ses cinq longues années de captivité. « Ce n’est pas si loin. Je vois aujourd’hui beaucoup de gens isolés, perdus dans ce monde d’injonctions et d’épouvantails en “isme”. On sent qu’ils attendent des solutions d’en haut alors que, pour 75 %, elles dépendent de nous. C’est ce qui me rend optimiste dans ce monde qui semble pourtant aller droit dans le mur », explique l’auteur de la chanson Les Temps sont durs.

Aux rimes en “isme”, Jean-Louis Aubert a préféré celles qui disent l’innocence, la bienveillance. « Ils t’ont brisé ces ailes / Tu les as oubliées / À vouloir t’enfoncer aussi près du sommeil », chante-t-il dans Tire d’aile. Puis, il chante Encore et après Pardonne et puis Demain.

En février 2019, alors qu’il assistait au mixage de son album avec Bénédicte Schmitt et Dominique Blanc-Francard, il a trouvé son titre, qui condensait tout son propos, Refuge. Le Sculpteur de vent le oeuvrera en live à partir du 7 novembre pour une série de huit concerts au Bataclan et en 2020 dans une tournée de vingt-deux Zéniths en France. « Ne cherche pas refuge ailleurs / Sois une île pour toi-même. »

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